La forme interrogative soutenue
La forme interrogative la plus soutenue est celle de l'inversion du sujet. Un trait d'union apparaît entre le verbe et le sujet qui se retrouve alors à droite du verbe : verbe + trait d'union + sujet + complément + ?. La règle est relativement simple dans la plupart des cas sauf dans celui de l'indicatif présent à la première personne du singulier. Autant le dire tout de suite, cette forme pose bien des questions et il est difficile d'y trouver des réponses.
Lorsque le pronom je est placé après le verbe, le e final devient tonique et est remplacé traditionnellement dans l'écriture par le é pour refléter sa prononciation. Avec la réforme de l'orthographe, on peut également le remplacer par un è. Les règles qui suivent ne sont pas modifiées.
- Eussé-je autant aimé l'enfant née d'un mariage heureux ? (Mauriac)
- Ô puissé-je, en expiation, souffrir de longues heures. (Proust)
- Aussi bien préféré-je... (Gide).
Cette construction reste cependant très littéraire et est peu employée dans le langage courant si ce n'est justement pour provoquer un effet de moquerie vis-à-vis du "beau langage". Les seules inversions qui sont véritablement employées à l'oral sont extrêmement rares. Citons le cas des verbes du troisième groupe monosyllabiques : dis-je, puis-je, vais-je, dois-je, ai-je et suis-je qui sont à peu près les seules à être utilisées fréquemment. Des formes comme viens-je ou cours-je sont remplacées par est-ce que je viens, est-ce que je cours pour éviter l'effet de plaisanterie.
On considère comme un barbarisme littéraire la solution consistant à modeler les verbes irréguliers sur les verbes en -er : "Metté-je" (Balzac), "Voulé-je" (Giraudoux), "Ecrivé-je" (Queneau). Ce barbarisme n'est pas récent et peu recommandé.
L'ajout de la finale en é peut entraîner des modifications phoniques ou graphiques. D'une manière générale, les modifications orthographiques précédemment en usage ne sont pas reprises :
- aie > ayé : je paie > payé-je
- aie > ayé : j'essaie > essayé-je
- oie > oyé : je broie > broyé-je
- oie > oyé : je nettoie > nettoyé-je
- oie > oyé : j'essuie > essuyé-je
- oie > oyé : j'ennuie > ennuyé-je
- è...e > e...é : je mène > mené-je
- è...e > e...é : je pèse > pesé-je
- è...e > é...é : j'altère > altéré-je
- è...e > é...é : je désespère > désespéré-je
- eler : j'appelle > appelé-je
- eter : je jette > jeté-je
Enfin, notons que seuls les modes indicatif et conditionnel peuvent prendre la forme interrogative (on trouve parfois, dans la langue littéraire, le plus-que-parfait du subjonctif, avec valeur de conditionnel passé : Eût-il dormi autant ?).